Oggetto del Consiglio n. 2306 del 21 marzo 2012 - Resoconto
OBJET N° 2306/XIII - Interpellation: "Introduction de l'enseignement du franco-provençal dans les écoles valdôtaines".
Interpellation
Le 1er mars dernier s'est tenue à Aoste une conférence des services organisée par l'Assessorat de l'Education et de la culture au sujet de la "mise en œuvre de l'enseignement du franco-provençal", qui se réalisera dans le cadre des activités extra-curriculaires d'élargissement de l'offre de formation;
les soussignés Conseillers régionaux
Interpellent
l'Assesseur à l'Instruction et Culture pour savoir:
1) sur quelle base législative se fonde l'introduction de l'enseignement du patois dans les écoles valdôtaines;
2) si la réalisation des cours de patois sera subordonnée, dans les intentions du gouvernement, à un nombre minimum d'adhésions de la part des familles;
3) si l'Assessorat estime que les cours devront être tenus par des enseignants titularisés ou par des experts autrement titularisés, et dans ce cas quels titres seront requis et quelle formation professionnelle spécifique sera organisée pour les enseignants de patois;
4) si le gouvernement régional considère que l'enseignement devra se tenir en utilisant un code linguistique standardisé ou bien suivant les variantes locales.
Signé: Louvin - Bertin
Président - La parole au Conseiller Louvin.
Louvin (ALPE) - Merci M. le Président.
La question que nous soumettons à l'attention du Gouvernement concerne la nécessité de tirer au clair le problème de l'enseignement du patois dans notre région. L'Assesseur à l'éducation dans les semaines passées a à maintes reprises insisté sur la nouveauté, sur le caractère historique - c'est le terme qu'il a utilisé - dans la reconnaissance de la langue maternelle des valdôtains pour ce qui est de sa possibilité de l'intégrer dans l'effort éducatif de notre système scolaire. Or, M. l'Assesseur, sachez que sur l'utilité de ce choix, au point de vue didactique et dans le cadre général du maintien du particularisme linguistique de notre région, vous trouvez dans notre mouvement une force politique très intéressée à la soutenir. Il est toutefois certain que nous devons aborder cette question dans une perspective tout à fait sérieuse, qui puisse aller au-delà de l'effet d'annonce des initiatives et visée à une intégration positive. Nous avons présenté cette interpellation donc pour vérifier le cadre de la question, d'abord en ce qui concerne les bases législatives et juridiques sur lesquelles peut se fonder cette introduction.
Au mois d'octobre dernier, quand nous avons discuté les normes portant application du Statut en matière linguistique, je n'avais pas manqué de souligner notre surprise du fait de ne pas voir dans ces dispositions, pour lesquelles le Conseil a émis un avis positif, qui sont actuellement en discussion au Conseil des Ministres...de voir l'absence de dispositions plus ponctuelles en matière d'enseignement du patois. Les dispositions se bornent simplement à affirmer d'une façon un peu générique que "la Regione, nell'esercizio delle proprie competenze, provvede alla salvaguardia, in attuazione di quanto disposto dalla legge n. 482/1999, e alla promozione dei caratteri culturali e linguistici della popolazione parlante il francoprovenzale, nonché della comunità walser".
La loi n° 482/1999 sur les minorités linguistiques, à laquelle se rattache textuellement cette norme - qui ne l'est pas encore puisqu'elle n'a pas encore été approuvée...par décret législatif par le Conseil des ministres...-, indique un certain nombre de parcours pour ce qui est de l'introduction des langues minoritaires, en prévoyant qu'elle soit utilisée pour le déroulement des activités éducationnelles et qu'elle soit prévue en tant que langue d'enseignement aussi: "le istituzioni scolastiche elementari e secondarie di primo grado, nei limiti dell'orario curriculare complessivo, al fine di assicurare l'apprendimento della lingua della minoranza, deliberano, anche sulla base delle richieste dei genitori degli alunni, le modalità di svolgimento dell'attività di insegnamento della lingua". Or, je sais que vous avez convoqué une conférence de service, que vous avez amorcé un parcours, mais ce que nous dit aussi cette loi c'est que les universités des Régions intéressées - et nous en avons une qui a aussi une vocation spécifique à la formation de notre corps enseignant - sont directement concernées: "le università delle Regioni interessate, nell'ambito della loro autonomia e degli ordinari stanziamenti di bilancio, assumono ogni iniziativa, ivi compresa l'istituzione di corsi di lingua e cultura delle lingue di cui all'articolo 2, finalizzata ad agevolare la ricerca scientifica e le attività culturali e formative a sostegno della finalità della presente legge". Il nous semble qu'il y a là le levier principal de formation d'un corps enseignant, qui devra progressivement intégrer, au moins pour un certain nombre de ces membres, la compétence nécessaire pour l'insertion du franco-provençal dans le cursus scolaire des élèves, mais là vous nous direz plus pour ce qui concerne la question facultative ou obligatoire de la part des familles.
Notre premier souci donc c'est qu'il y ait un corps enseignant formé pour ce faire, sur des bases qu'il vous appartient de négocier avec les universités et en concertation avec les organisations syndicales pour qu'il y ait cet élargissement et cette intégration au sein de nos écoles. Qui seront donc ces enseignants? Est-ce que nous aurons des enseignants titularisés ou des experts externes? Est-ce que nous demanderons des titres spécifiques pour cet enseignement et nous ferons de sorte qu'ils soient intégrés aussi dans l'action de planification éducative qui se tient à l'intérieur de nos classes, ou bien est-ce qu'ils seront utilisés uniquement en tant que ressources externes et non intégralement insérés dans le circuit de la classe elle-même? Voilà ce qui nous inquiète, parce que nous estimons que le passage soit d'importance capitale, mais nous souhaitons qu'il devienne un patrimoine du système scolaire régional dans son ensemble et non pas une action externe au système et uniquement parallèle à l'action qui se déroule dans les écoles. Cela concerne notamment la didactique du français et des relations qu'il peut y avoir entre les deux langues et en tout cas une intégration qui doit se faire de façon plus générale par rapport à toutes les langues qui sont enseignées.
Enfin vous n'aurez pas manqué de remarquer qu'il y a un souci aussi de clarté de notre part pour ce qui est de la matière d'enseignement, ou bien le code linguistique plus précisément qui est à identifier. Il y a là un vaste débat qui anime le monde culturel valdôtain concernant l'option favorable à un code davantage unifié et standardisé du patois, plutôt que des orientations qui sont davantage favorables au maintien et à la mise en valeur des variantes locales. Là je ne veux pas vous inviter à aller sur un terrain de vastes débats scientifiques, mais certainement des options seront à prendre sur le plan pratique et cela fait appel donc à votre orientation et aux indications que vous voudrez fournir dans le cadre de l'action expérimentale que vous souhaitez mener. Merci.
Président - La parole à l'Assesseur à l'éducation et à la culture, Laurent Viérin.
Viérin L. (UV) - Merci M. le Président.
La valorisation du patrimoine immatériel de notre communauté, en particulier sa tradition orale, ses uses et ses costumes, ainsi que ses langues, qui en sus du français et de l'italien comprennent notamment le patois et les parlers walser de la Vallée du Lys, car, quand on parle d'insertion du patois, on parle aussi des langues de la Vallée du Lys...donc cette politique de valorisation était au centre de notre action et de notre politique culturelle et linguistique au cours de ces dernières années. La norme d'actuation que vous avez citée est une norme que j'ai personnellement proposée, on souhaite qu'elle soit adoptée...et qui est, d'un point de vue historique, une première...quand j'utilise le mot "historique", il signifie qu'avant cela n'avait pas été fait, donc je crois simplement de reparcourir les étapes de ce parcours.
Nous avons œuvré dans tous les domaines pendant ces dernières années avant d'arriver à cet aspect de formaliser une requête d'insérer le patois à plein titre et le walser dans le plan de l'offre de formation, nous avons encouragé l'usage dans les différents contextes de ces langues historiques, qui sont à la base de notre identité en tant que peuple. Pour ce faire, nous avons adopté une approche nouvelle, non seulement tradition, mais aussi modernité. Voilà les valeurs qui guident notre action. Nous voulons mettre en valeur tout ce qui représente la culture et la tradition de notre communauté, la civilisation valdôtaine, ses langues non pas dans une démarché passéiste et rhétorique, mais dans une perspective moderne et actuelle. Celle-ci c'est ma conviction, voilà pourquoi notre action a visé en particulier à faire en sorte que le patois devienne véritablement le patrimoine de tout le monde. Il s'agit de valoriser la langue de nos ancêtres d'une part comme expression de nos racines, de notre passé, de notre identité, mais d'autre part aussi comme langue d'intégration. Tous ceux qui ne sont pas valdôtains d'origine, mais ils le sont d'adoption car ils s'installent dans notre région, ou ceux qui n'ont pas eu la possibilité d'apprendre cette langue auront ainsi une occasion de découvrir ce signe distinctif de notre communauté et ils pourront se reconnaître dans cette communauté et dans ses valeurs grâce surtout à la connaissance de ce patrimoine et de ces langues. Toute notre initiative repose sur la nouvelle conception du patois, renouvelée, qui n'est plus considéré uniquement comme la langue autochtone de tradition, mais comme une langue d'intégration, une langue qui ressemble et qui ne représente pas une fermeture, mais une ouverture et qui devient le patrimoine de toute la communauté. Nous avons eu, lors du dernier bain de langues, une japonaise qui s'est inscrite, qui ne vit pas dans cette région et qui a voulu connaître ce patrimoine. Voilà le chemin à suivre pour changer la perception de cette langue, pour ne pas reproposer le thème de l'imposition linguistique qu'on connaît, pour la rendre attrayante même pour ceux qui ne l'ont pas apprise en famille, pour la présenter comme une opportunité en plus pour se reconnaître dans les valeurs de la communauté valdôtaine. Le succès de ces activités, qui ont préparé le terrain, la découverte du patois, les manifestations culturelles démontrent que nous sommes sur la bonne voie et nous encourage à poursuivre nos efforts dans cette direction.
Je suis heureux de savoir qu'il y a des appuis et je veux rappeler la récente comédie musicale qui a eu un succès énorme surtout parmi ceux qui ne connaissent pas le patois et toutes les initiatives comme le Concours Cerlogne, les Journées de la civilisation, le Festival des peuples minoritaires, le guichet linguistique, le théâtre populaire, le nouveau patoisant, cette recherche très détaillée sur ce nouveau phénomène et tout le matériel pédagogique et didactique qu'on a fourni aux écoles, le dictionnaire du petit patoisant, plutôt que des audio-livres en patois, mais des instruments aussi modernes comme le photoroman en patois et aussi un parcours de reconnaissance à l'Unesco pour reconnaître le patois et le walser comme patrimoine immatériel de l'humanité. La communauté a répondu et le trend est en croissance, le Concours Cerlogne a augmenté de 1.000 unités en trois ans, nous sommes à 4.200 élèves, après toutes ces actions la conviction était de proposer pour la première fois l'enseignement du patois dans nos écoles et d'inscrire officiellement cette langue, trop longtemps exclue de l'école, dans le plan de l'offre de formation, lui conférant la dignité institutionnelle qui lui manquait. Ce projet se concrétisera par l'insertion, au cours de l'année 2012, de l'enseignement du patois dans les écoles valdôtaines à titre expérimental et facultatif dans le but de valoriser ce moyen d'expression de notre culture. Les résultats obtenus à ce jour sont la preuve de l'intérêt de toute la communauté valdôtaine pour la reconnaissance de cette langue, elle risque de disparaître si elle n'est pas protégée sur notre territoire et elle risque de rester le dernier...en faire usage couramment... L'école est par définition l'endroit idéal pour la formation linguistique et culturelle, donc le patois pourra ainsi être transmis de façon innovante et créative et favorisera la motivation des élèves, sans pour autant être imposé.
"Sur quelle base législative..." pour en venir aux questions. Les fondements législatifs pour l'introduction du patois dans les écoles sont ceux relatifs à la sauvegarde des minorités linguistiques figurant en la loi n° 482/1999. Pour ce qui est des propositions didactiques mises en place par l'Administration régionale pour les institutions scolaires, elles reposent sur la loi régionale n° 19/2000. Je rappelle aussi qu'aux termes de la loi n° 18, l'Administration et les institutions scolaires œuvrent pour l'amélioration progressive des prestations essentielles du droit à l'éducation compte tenu des traditions et des valeurs culturelles et linguistiques de la Vallée d'Aoste. Je tiens à souligner aussi que la délibération n° 2771/2011 a repris point sur point ces indications lorsqu'elle a institué une commission d'étude chargée de rédiger une proposition à soumettre aux institutions scolaires autonomes pour organiser des cours de patois hors cursus, mais dans le plan de l'offre de formation et surtout dans le cas de l'élargissement de cette offre de formation.
Deuxième question: "si la réalisation des cours sera subordonnée...à un nombre minimum..." avant le lancement des cours. Il y a une enquête qui est en cour pour évaluer le volume d'adhésions à cette initiative et pour la prochaine année scolaire les cours seront organisés dans trois zones pour commencer, à savoir haute, moyenne et basse Vallée.
La question des enseignants: les cours de patois devront être tenus par des experts titularisés sur la base d'un cours de formation que les experts techniques...du groupe de travail composé par des experts techniques, à savoir Saverio Favre, Alexis Bétemps et Rita Decime, avec des enseignants, des dirigeants scolaires, du personnel et d'un point de vue pédagogique et d'un point de vue ethnographique et culturel, donc aspects français, civilisation...qui est en train d'élaborer les contenus et de prédisposer ces cours.
"Si le Gouvernement régional considère que l'enseignement devra se tenir en utilisant un code linguistique standardisé...": l'enseignement devra respecter les variantes locales du patois. Nous essaierons - et cela est dans nos intentions et dans l'intention du groupe de travail - de considérer toutes les variantes du patois et pas seulement la standardisation d'un patois. C'est donc un parcours qui a débuté par le conseil scolaire, les dirigeants scolaires, les organisations syndicales pour commencer à exposer quelles étaient nos intentions et le parcours et justement qui dans cette prochaine période continuera sur le sillon que vous ai annoncé. C'est une partie très importante, je le partage, nous avons à l'intérieur de ce groupe de travail essayé de choisir les personnes et les gens qui ont dédié leur vie pour l'école, comme Rita Decime par exemple et qui ont su apporter à l'intérieur de ce groupe de travail leur sensibilité scolaire, pédagogique, mais aussi d'un point de vue normatif et législatif, afin que ce passage soit un passage le plus possible partagé et surtout qu'il garantisse la haute qualité de l'enseignement non seulement d'un point de vue pédagogique, mais aussi linguistique, ethnographique et de civilisation de notre région.
Président - La parole au Conseiller Louvin.
Louvin (ALPE) - Merci M. le Président.
Le point de départ est certainement commun, M. l'Assesseur, nous avons des points de vue probablement très semblables sur l'intérêt à la fois et la nécessité de soutenir la présence vive di patois et des dialectes germaniques de la Vallée du Lys, il y a toutefois une approche différente entre nous à ce sujet. Premièrement nous commençons à considérer qu'il y a eu dans ces dernières années une rhétorique du patois un peu trop soutenue. Vous avez présenté votre appareil de manifestations, d'initiatives en rappelant tout ce qui est fait, d'ailleurs n'oublions pas qu'on dépense quelque chose comme 1.500.000 d'euros par année sur le chapitre pour ce qui est du secteur ethnographique et du soutien du patois, donc vous avez quand même un portefeuille important à ce sujet à gérer, mais il y a dans cet éventail, dans cette palette de plus en plus large d'initiatives quelque chose d'un peu exagéré, qui risque de faire une parodie du patois. Vous me permettez cette opinion tout à fait personnelle, mais ce n'est pas en visant toujours plus haut au niveau de la communication, de la spectacularisation du patois, de l'Unesco au Japon, de la comédie musicale au photoroman que nous renforçons les bases réelles du patois. J'ai participé comme vous au Concours Cerlogne dans ces dernières années pour y assister, pour parler avec les enseignants et les enfants et nous savons bien la fragilité que nous avons sur ce terrain; le travail, à notre avis, donc est à faire un peu plus en profondeur.
Deuxième aspect: la question des normes que vous avez rappelées. La loi n° 482 dit certaines choses, nous n'avons pas le sentiment que vous êtes en train de travailler dans le sillon de la loi n° 482 et nous le disons surtout pour ce qui est de la formation des enseignants. Lorsque le premier cours de formation pour les instituteurs a été organisé dans la région à partir de 1999, donc l'année même de cette loi, il y avait un cours à l'intérieur de la formation des maîtres sur la civilisation valdôtaine et l'utilisation d'enseignants tirés évidemment de l'extérieur, il n'est pas indispensable qu'un titulaire d'un cours soit nécessairement un professeur titré de l'université, mais avec la certification du travail universitaire, cela peut permettre de donner autre chose que des cours de formation que vous avez imaginés. Vous pensez former les instituteurs du patois à travers des cours de formation en dehors du monde scolaire et, croyez moi, cela commence à susciter dans le milieu de l'école des vives inquiétudes. Surtout cela fait de sorte que le patois soit toujours considéré encore extérieur à la didactique régionale, ce sera une offre ultérieure, une opportunité comme vous le dites, mais, si vous croyez vraiment au-delà des slogans...vous avez rappelé: "tradition et modernité, non au passéisme, langue d'intégration, opportunité, non à la fermeture, nouvelle conception, non à imposition", vous avez reparcouru tout l'ensemble des slogans qui sont utilisés d'habitude, mais, si vous croyez vraiment à l'intégration du patois dans l'école, il faut que les instituteurs soient partie prenante de cet effort. Si vous estimez par contre devoir uniquement vous appuyer sur des sujets externes, vous aurez probablement un effet de folklorisation du patois, qui est contraire à nos attentes et à nos espoirs. Je vous remercie, ce dossier sera certainement suivi avec la plus haute attention de notre part.