Oggetto del Consiglio n. 12 del 11 marzo 1954 - Verbale

OBJET N° 12/54 - PERSONNALITES DE LA VALLEE D'AOSTE DISPARUES.

Mr. le Président de la Junte, Avt. CAVERI, prie Messieurs les Conseillers de bien vouloir lui permettre de parler d'une question qui n'est pas à l'ordre du jour de cette séance.

Il remarque que le Conseil s'est occupé, le matin, du sucre et, dans l'après-midi, du vin et qu'il s'occupera encore du beurre, de la fontine, du bilan, de la répartition des impôts, etc., questions matérielles qui intéressent la population. Il fait noter qu'il ne faut pas oublier, cependant, que, hors de ces questions matérielles très importantes, il y en a d'autres qui ne sont pas moins importantes.

Cela dit, Mr. le Président de la Junte, Avt. Caveri, déclare ce qui suit:

La Vallée d'Aoste, qui avait eu déjà la douleur de perdre EMILE CHANOUX dans la période antérieure à la libération, a perdu, dans cette dernière année, plusieurs hommes illustres: le Prof. DEFFEYES, l'Avt. TORRIONE, le Chan. BREAN, le Prof. BROCHEREL, et le Prof. Mgr. BOSON.

C'étaient des hommes qui avaient chacun leurs idées, qui voyaient les choses d'un angle visuel différent, mais tous ont rendu de grands services à la Vallée d'Aoste.

Nous ne devons pas oublier, parmi ces hommes, Mgr. Boson, qui à été un des derniers représentants du clergé valdôtain du XIX siècle (l'on considère que le XIX siècle ne finit pas en 1899, mais qu'il continue jusqu'à la guerre 1914-1918), de ce clergé valdôtain du siècle passé dont Philippe Burzio, dans un livre aujourd'hui devenu très rare et intitulé "Aosta-Ginevra - Vita Nuova", disait qu'il formait une espèce de franc-maçonnerie, c'est-à-dire, une espèce d'élite d'hommes ayant une grande culture, une grande intelligente et une grande dignité morale, qui vivaient d'une manière intense la vie du pays, qui avaient toujours défendu la langue française et les droits de la Vallée d'Aoste.

Mgr. Boson a été un des derniers représentants de ce vieux clergé valdôtain qui tend à disparaître, de ce clergé qui faisait de longues promenades, qui n'allait pas en "Lambretta" ni en automobile, qui avait la soutane verte par l'usure, qui n'employait pas la brosse à dents.

Mais c'étaient des hommes qui aimaient leur pays, qui faisaient les sermons en langue française; c'étaient des prêtres tels que l'Abbé Trèves, lequel malgré toutes les accusations, avait voulu fonder la "Jeune Vallée d'Aoste".

Bien de choses sont changées depuis lors; en effet nous avons l'impression d'une certaine absence du clergé, aujourd'hui, dans les problèmes de notre pays et de notre population.

On a dit sur le journal "Le Pays d'Aoste", - avec lequel je suis en polémique - que Mgr. Boson était un individu qui jugeait le monde "du point de vue de Sirius". C'est exact. Il avait étudié les tablettes de l'ancienne civilisation des Assyriens, les codes du XIV siècle, etc. Cet homme considérait les événements contemporains comme si ces événements étaient contemporains des anciennes civilisations disparues et peut-être pour lui le temps était quelque chose de relatif; mais le fait d'être tellement détaché des évènements contemporains lui donnait une grande sérénité, une grande dignité de vie et c'est pour cela que nous avons aujourd'hui le devoir de le rappeler.

Je ne dirai pas quels ont été ses mérites. Vous savez tous que Mgr. Boson a été surtout un grand studieux. Il avait été aux Universités de Milan, de Turin, de Rome, de Monaco; il connaissait plusieurs langues; il avait beaucoup voyagé en Orient, en Mésopotamie, en Egypte, en Iran, etc. et avait étudié l'archéologie orientale avec une grande passion. Il connaissait à fond l'histoire de la Vallée d'Aoste et c'est grâce à sa collaboration que l'Administration régionale a pu publier plusieurs volumes, qui lui font honneur et qui nous font honneur, entr'autres, le volume sur le château de Fénis et sur le château d'Issogne, les trois volumes de Paléographie valdôtaine et les volumes de Miscellanea. Ce sont tous des livres très soignés et qui portent l'empreinte de la grande science de Mgr. Boson, qui n'était pas un "dilettante", mais un studieux très subtil et très sérieux.

Je pense que nous aurions manqué à notre devoir, si dans cette séance du Conseil de la Vallée - qui suit de quelque semaines la disparition de ce valdôtain illustre - nous n'avions pas rappelé sa mémoire et en même temps, la mémoire de ces cinq valdôtains qui ont disparu de ce monde en laissant des vides qui ne peuvent être remplis.

Le Prof. Brocherel, par exemple, qui avait une formation différente de celle de Mgr. Boson, avait de grandes qualités, il était un autodidacte et s'était formé une vaste culture, très personnelle et très originale, dans l'histoire, dans le folklore, dans la géologie, dans la géographie, dans l'histoire de l'art etc. Aussi la perte du Prof. Brocherel est une perte que difficilement nous pourrons remplacer. Nous avons tous, Junte et Conseil régionaux, la préoccupation que la Revue "Augusta Praetoria" puisse continuer à paraitre, mais nous sommes très embarrassés quant au choix de la personne qui devra remplacer le Prof. Brocherel dans la direction de cette Revue.

Cinq valdôtains ont disparu dans cette dernière année; chacun d'eux avait une personnalité, une mentalité, des idées très différentes, mais tous ces hommes ont beaucoup aimé leur pays et lui ont rendu de grands services, même si chacun d'eux l'a aimé à sa façon.

Mr. le Président du Conseil, Avt. BONDAZ, déclare d'être certain d'interpréter les sentiments unanimes de Messieurs les Conseillers en s'unissant, au nom du Conseil, aux paroles très émouvantes que Mr. le Président de la Junte, Avt. Caveri, a prononcées en rappelant Mgr. Boson et les autres chers amis disparus.

LE CONSEIL

prend acte.

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